5 septembre 2013

Petit Précis de densité Urbaine (1/2)

          Aujourd’hui, les discours des acteurs de l’aménagement tendent à promouvoir un retour à la «ville compacte», reconstruite sur elle-même. La densité fait débat en termes de rentabilité urbaine, de qualité de vie, de forme de ville. Dans la conscience collective, l’idée même de densité n’a pas très bonne presse, souvent associée à des images négatives de promiscuité, de concentration, de surpeuplement ou de verticalité. Comment, alors, appréhender cette question qui, avec l’étalement urbain, est au coeur des réflexions sur le devenir de la ville ?  

Lyon - La Croix-Rousse, quartier parmi les plus dense d'Europe, et parmi les plus appréciés!

Qu'est ce que la densité e urbanisme?
La densité est le rapport entre un élément quantifiable — habitant, emploi, mètre carré de plancher, par exemple — et la surface d’un espace de référence. Elle peut être faible ou forte et plus ou moins bien perçue selon qu’un équilibre «subtil» s’établit entre ces différents indicateurs : la concentration de population, l’intensité de l’activité, la densité du bâti, la proportion d’espaces verts publics, etc. En se complétant, ces indicateurs permettent une appréhension plus globale du concept de densité. 
  • Le coefficient d’occupation du sol 
Le coefficient d’occupation du sol (COS) est l’outil réglementaire par excellence. C’est lui qui permet de définir un «droit à bâtir» sur une parcelle. Autrement dit, il représente les possibilités de construire sur une parcelle. Il est la densité rendue possible par le règlement d’urbanisme. Cependant, ce n’est pas un outil de maîtrise de la forme urbaine. Celle-ci est modulée selon d’autres règles : la hauteur, le rapport du bâtiment avec la rue, ou avec les autres bâtiments, etc. 
  • La densité bâtie : m² bâtis  / hectare
Contrairement au COS, le calcul de la densité bâtie se rapporte au réel et non plus au possible. Elle correspond à ce qui existe sur le terrain. En cela, elle reflète la perception que l’on peut avoir d’une densité. Pour plus de pertinence, il est opportun de ne pas la considérer à la seule parcelle, mais à l’îlot afin d’inclure les éventuels espaces publics et l’ensemble des éléments bâtis présents sur le site. 
  • La densité  de population : habitants / hectare
Suivant le type de représentation utilisé et l’échelle choisie, la densité de population permet de donner des analyses plus ou moins approfondies. La densité de population à la commune est utilisée pour comparer des villes de µtailles différentes. On calcule aussi le nombre d’habitants à l’hectare afin de déterminer la concentration de population sur un secteur donné. 
  • La densité  résidentielle : habitants / hectare
La densité résidentielle permet de donner une mesure de l’occupation du sol par le logement. On peut la classer selon des seuils de densité. Faible, moyen ou fort, les seuils peuvent être différents selon le type d’habitat. La densité résidentielle peut aussi permettre de définir des seuils pour les besoins en équipements (équipements scolaires en particulier). 
  • La densité  d’emplois : emplois / hectare
La densité d’emplois permet d’identifier les espaces concentrant le plus d’emplois. Lorsque le calcul est rapporté au type d’activité présente, la densité d’emplois permet, à un niveau infracommunal, de mesurer l’intensité d’un secteur d’activité en particulier. La densité la plus utilisée est la densité résidentielle, on s’attardera donc sur celle-ci dans cet article.

Afin de bien comprendre les divers intérêts que recouvrent la densité et pourquoi cette notion occupe de nombreux débats, il s’avère nécessaire de faire un retour dans le temps.

A suivre dans le deuxième volet de cet article!

Eugénie Cocteaux, Emmanuel Bucki

8 janvier 2012

Vers un "label EcoQuartier" (2/2)

Les premiers éléments d’un référentiel national

Les lauréats du 2ème appel à projets EcoQuartier ont été communiqués le 30 novembre 2011. A cette occasion, Benoist Apparu, Secrétaire d’Etat au Logement, a annoncé officiellement la création d’un « Label EcoQuartier » qui fera l’objet d’un test en 2012. Si les détails du label ne sont pas encore connus, la grille d’analyse de l’appel à projet donne une première idée des contours du futur référentiel.

Lors du premier appel à projets EcoQuartier (2009), une grille d’analyse avait déjà été élaborée et avait connu quelques critiques. Pas assez complète et précise, elle s’appuyait sur les 3 piliers du développement durable sans véritable déclinaison en langage « urbanisme opérationnel ». Par ailleurs, il existait dans cette première grille des manques importants sur les questions de pilotage de projets et gouvernance participative.
Entre ces 2 appels à projets, un « Club EcoQuartier » a été constitué pour réfléchir à un nouvel outil d’analyse des projets pour 2011. Cette grille, qui a servi trame au dossier de candidature, a également comme objectif de servir de fil conducteur pour conduire un projet d’aménagement exemplaire. En ce sens, elle préfigure la base du futur référentiel « EcoQuartier ». Et bonne nouvelle, la philosophie portée par le ministère semble s’orienter vers une approche transversale de l’urbanisme durable. 

La grille d’analyse prend en compte à la fois la démarche de projet, la gouvernance et les objectifs poursuivis dans les réalisations. Elle s’appuie sur 4 dimensions / 20 ambitions et balaie bien l’ensemble des enjeux en matière d’urbanisme durable. Il n’y a pas de réponses types, ni de solutions uniques proposées, on constate plutôt une exigence de résultats qu’une exigence de moyens. 
Parmi les autres points positifs, c’est une grande satisfaction de voir les usagers et les modes de vie comme l’une des portes d’entrée de la grille (ambitions 2, 6, 7, 8). L’outil insiste également sur la nécessité d’une bonne insertion urbaine et de la cohérence territoriale des projets (ambitions 2, 5, 9, 14). Par ailleurs, les documents de planification sont intégrés dans l’analyse avec un zoom sur les SCoT et PLU (2, 20), PLH (2), Plan Climat (16), Schéma Régional de Cohérence Ecologique (20), etc.
Le concept d’Ecoquartier tel que la grille le défini est ainsi un projet exemplaire sur tous les aspects de conception et de programmation. Le Label EcoQuartier qui en découlera devrait prendre la forme d’un guide de « bonne conduite des projets d’aménagement » qui évite l’effet vitrine environnementale, permet d’évaluer une démarche d’amélioration continue et se préserve de toute tentation normative. Le Secrétaire d’Etat au Logement a signalé qu’il faut se « prémunir du tampon écoquartier » et les lauréats 2011 semble aller dans ce sens : ce sont des projets ambitieux et variés qui apportent des solutions adaptées à des contextes locaux très différents.
Il est très intéressant de voir que sur les 393 dossiers, il y a une majorité de projets dans de petites et moyennes villes, dont un nombre important de dossiers en milieu rural. On retrouve cette diversité avec par exemple les 2 prix « Territoires Stratégiques » pour des communes rurales (Bertignat et Limans), ou encore des projets de rénovations de quartiers existants (La Duchère à Lyon et Wolf-Wagner à Mulhouse). Il faut également noter l’ancienneté de certains projets récompensé, valorisant ainsi les projets d’urbanisme précurseurs et volontaires. 
C’est peut-être le premier mérite de ce concours, à savoir reconnaitre l’importance de projets urbains forts et cohérents, portés par les élus, les techniciens et les citoyens. Cela fait échos aux enjeux défendus par le Collectif National des Jeunes Urbanistes qui cherche à donner à cette discipline une reconnaissance à la hauteur de son impact sur la société.  
Tel qu’il est envisagé, le futur Label Ecoquartier devrait permettre d’apprécier l’ambition des projets selon le contexte urbain dans lequel ils s’inscrivent et ainsi de redonner du sens à l’action des collectivités pour leur urbanisme. 


Paul-Antoine Lecuyer, Emmanuel Bucki


--> 1/2: Vers un label écoquartier

15 novembre 2011

Vers un "label EcoQuartier" (1/2)


Est-il souhaitable de normaliser les quartiers Durables ?

D’ici la fin du mois de novembre seront désignés les lauréats de l’appel à projets EcoQuartiers lancé au début de l’année 2011. La démarche initiée par le MEDDTL vise à distinguer les projets d’aménagements les plus innovants et exemplaires en matière d’urbanisme durable.

Pour l’occasion, le ministère a développé une grille d’analyse des projets qui servi également de trame pour la rédaction des dossiers de candidatures. L’objectif final affiché par le ministère est d’élaborer pour l’année 2012 un référentiel qui permettra de définir un « Label EcoQuartier ».

Historiquement le concept d’écoquartiers s’appuie sur des expériences pilotes sensées ouvrir l’urbanisme sur de bonnes pratiques, sur la recherche d’innovations. « L’urbanisme durable reste un courant urbanistique assez peu théorisé, si on le compare à l'urbanisme moderne marqué par l'autorité de ses chefs de file. » C. Emelianoff.

En réalité, de nombreux référentiels/chartes/guides ont été créés pour encadrer les démarches écoquartier mais aucun ne s’est imposé de façon à harmoniser les « niveaux de performance » des projets. Parmi les « outils » les plus souvent rencontrés, on retrouve des démarches assez souples (AEU), des référentiels territorialisés (Charte de Lille Métropole, AURA de Montpellier), des outils de pilotage et d’évaluation (HQE Aménagement), etc.

Les 400 dossiers reçus par le ministère en 2011 montrent le succès des démarches écoquartier et du même coup le risque évident d’une utilisation abusive du concept. Par exemple, le projet de La Clémentière à Granville (lauréat de l’appel à projet 2009) a connu quelques critiques qui s’interrogeaient sur la possibilité pour un écoquartier de cumuler étalement urbain, artificialisation de terres agricoles, manque de transports en commun (3km du centre ville), projet de maisons pavillonnaires classiques, et finalement peu d’exigences environnementales.

Le processus de normalisation des projets « EcoQuartier » serait ainsi une réponse à face à la dérive d’une forme de marketing territorial ; tout projet baptisé (sans exigence) étant aujourd’hui rendu attractif, quelle que soit son ambition.
Cette volonté d’harmonisation des ambitions écoquartiers se décline également à l’échelle européenne avec le projet « Reference Framework for a Sustainable Cities » (RFSC).

Cela dit, au-delà de la lutte contre l’effet vitrine, est-il légitime de construire une norme pour encadrer les niveaux de performance et distinguer un projet ambitieux de celui qui ne l’est pas ?

Comme toutes les grilles d’analyse d’appel à projets - voir les démarches régionales similaires en Ile de France (NQU), en Rhône Alpes, etc. – la grille « EcoQuartier » n’est pas directement un outil de suivi opérationnel. C’est une « check-list » complète des enjeux et objectifs généraux à aborder. Faut-il aller plus loin en définissant des indicateurs, des niveaux de performance ?

En gardant l’ambition de ne pas définir de solutions uniques, il semble nécessaire de décliner la grille « EcoQuartier » dans une dimension plus opérationnelle et en ce sens la rapprocher d’outils de pilotage des démarches écoquartiers, dits Systèmes de Management Environnemental (SME), qui identifient les étapes, les acteurs, les documents à produire, etc. Ces outils SME connaissent d’ailleurs eux aussi la même tentation de la certification. 


Un écoquartier étant par définition un projet local puisque l’un des fondements de la démarche est la démonstration par l’exemple, il semble très délicat, voire dangereux, de définir pour tous les projets des indicateurs censés permettre l’atteinte de niveaux de performance. Le risque est évidemment que la performance environnementale se fasse au détriment de la qualité du cadre de vie et de la cohérence urbaine des projets. 

Le ministère a d’ores et déjà posé les principes du futur « label EcoQuartier » en précisant qu’il ne reposera pas sur une norme, qu’il devra être adaptable à tous les contextes, et qu’il s’appuiera sur des critères transparents. Pour garantir l’élaboration d’un quartier en adéquation avec ses spécificités locales, il est essentiel de faire en sorte que « La participation citoyenne, un des trois piliers de la gouvernance urbaine (avec les élus et les techniciens)  soit au cœur de la manière d’élaborer ces quartiers » (voir Un référentiel de quartiers durables, une fausse bonne idée ?). 
Aussi peut-on espérer qu’au-delà d’une démarche de labellisation, la législation française renforce les mécanismes de concertation.